Pourquoi des Chevaliers et Dames au troisième millénaire?

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Investitures à Paris

Une trentaine de nouveaux Chevaliers et Dames de l'Ordre du Saint-Sépulcre, ont été adoubés le 24 septembre par le cardinal Edwin O'Brien, Grand Maître, en la cathédrale Saint-Louis des Invalides, à Paris, après la veillée d'armes dans l'église capitulaire de la Lieutenance de France. Extrait de l’homélie de Mgr Luc Ravel, évêque du diocèse aux Armées françaises, lors de la messe des Investitures:

 

Il me semble que c’est la guerre qui fait le chevalier, comme l’abbaye fait le moine, le mariage les époux, la pauvreté les mendiants, l’Eucharistie les prêtres.

Et nous sommes doublement en guerre : parce que le Diable ne renoncera jamais et parce qu’aujourd’hui cette lutte intemporelle prend la forme d’une nouvelle guerre concrète, dont la terreur est le chemin et la barbarie le but explicite. A propos de l’assassinat du père Jacques Hamel, le pape François n’a pas hésité à parler du Diable en citant le père Jacques lui-même : « Va-t-en Satan ! »

Cette guerre, cette dureté de la marche dans la tempête, cette confrontation du Royaume et du monde, tout chevalier la pressent et s’y prépare pour un jour la vivre comme un combat. Violence. Lutte. Guerre. Le chevalier les accepte comme une composante de son histoire puisqu’elle est une donnée de l’Eglise. Il a compris l’effroyable mixité, le mélange dramatique de l’amour et de la douleur. Il ne cherche pas à ignorer les injustices ni à détourner les yeux du sang qui coule. Il ouvre grand ses yeux pour que les aveugles voient, il veille quand les autres dorment, il met toute une vie à acquérir les compétences physiques, psychiques, spirituelles pour prendre le poste de première ligne, sur les murs de la Cité, sur les fronts de la pensée. C’est pourquoi il existe : il se prépare avant le combat pour le livrer sans peur quand il se présente.

Il n’est pas nouveau de parler ainsi de la vie chrétienne avec ses premières lignes de front et ses arrières gardes. Saint Paul nomme bien Epaphrodite (Ph 2, 25) et Archippe (Phm 2, 25) mon « compagnon d’armes ». Il a une conscience aiguisée d’être en campagne pour mener « notre combat » (2 Cor 10, 3-4). Il presse Timothée de combattre « le bon combat » (1 Tim 1, 18) ou d’être « un bon soldat du Christ » (2 Tim 2, 3).

Dieu propose l’amour, le monde impose la guerre. Dieu invite à la grâce. Le monde lève les armes. Dieu appelle à l’unité, le monde brise la confiance.

Le chevalier a donc senti l’appel de Dieu à se tenir ferme sur la brèche, au lieu précis de la déchirure, à l’exacte limite où, plus qu’ailleurs, l’homme vibre des tressaillements terribles de la terreur, des chocs massifs de la guerre. Là où les plaques tectoniques se frottent l’une l’autre, là où les énergies divines se cognent aux forces de mort.

Je connais trop la mission du soldat pour vous tenir un autre discours.


(26 septembre 2016)